Par Michel Broué, Président.
Le Fonds pour une Presse Libre (FPL) est un organisme à but non lucratif ayant pour objet « de défendre la liberté de l’information, le pluralisme de la presse et l’indépendance du journalisme ; contribuer à la protection du droit de savoir et de la liberté de dire à l’heure de la révolution numérique ; promouvoir un journalisme d’intérêt public, portant des valeurs humanistes, au service du bien commun et de l’égalité des droits, du rejet des discriminations et du refus des injustices » (Journal Officiel de la République française, 14 septembre 2019). Enfant de la presse indépendante, le FPL a été créé dans le cadre des réorganisations administratives et financières entreprises par Mediapart pour « sanctuariser » son propre capital. La solution imaginée par les fondateurs s’est inspirée de celle du Guardian britannique, en utilisant pour le FPL la structure de « Fonds de dotation » récemment créée en France. Il est à noter que l’indépendance que défend le FPL s’exerce aussi à l’égard de Mediapart : nul responsable de Mediapart ne peut siéger au Conseil d’administration du FPL, et le FPL ne peut financer Mediapart ni directement ni indirectement ; alors qu’à l’inverse Mediapart est tenu de verser chaque année une partie de ses bénéfices au FPL.
La mise en place du FPL, son Conseil d’administration, le recrutement de sa directrice exécutive, ainsi que la création de son Conseil stratégique — instance essentielle d’évaluation des projets qui sollicitent le soutien du FPL — se sont essentiellement déroulés pendant la période de pandémie mondiale. C’est plus souvent en « distanciel » qu’en « présentiel », pour jargonner Covid, que nous avons fait connaissance, travaillé, lancé la première campagne d’appel à projets, discuté et décidé de la sélection des lauréats. Et il est plus qu’encourageant que nous ayons réussi, non seulement à faire, je pense, du bon travail, mais à créer entre nous tous une confiance et un intérêt manifestes.
Nous avons, à l’issue de cette première campagne, décidé de soutenir financièrement trois projets sur les vingt-sept candidatures reçues : un journal d’information « locale », la revue Far Ouest, implantée depuis 2017 en Nouvelle Aquitaine ; la revue Orient XXI, qui cherche depuis 2013 à mettre en évidence des informations sur le Proche et le Moyen-Orient ; le media Guiti News, créé en 2018 pour participer au changement de récit collectif autour de la migration. Un nouvel appel à projets sera rendu public au printemps, et nous allons peu à peu diversifier nos soutiens.
Pour ce faire, il nous faut aussi trouver des ressources, des mécènes. La défiscalisation (les deux-tiers des dons au FPL sont déductibles du montant de l’impôt sur le revenu) est certes un argument, mais nous devons surtout montrer l’intérêt, l’efficacité, et la singularité de notre intervention en faveur de l’indépendance financière et politique de la presse. Tout d’abord, l’expertise et le sérieux de notre Conseil stratégique en sont un des garants. De plus, dès que la situation sanitaire le permettra, il nous appartiendra aussi de faire entendre notre voix et de contribuer à organiser des ripostes collectives à certaines menaces actuelles inquiétantes sur la liberté de la presse, de certains licenciements à des opérations financières parfois douteuses, des entraves au travail des journalistes pendant les manifestations à certains projets de loi actuellement en discussion.
En cette période de très grandes incertitudes de tous ordres, de méfiances exacerbées — parfois justifiées, parfois manipulées —, la nécessité d’une information indépendante des pouvoirs de tous ordres, et de très grande qualité, est vitale pour la démocratie. L’information est un bien public et doit le rester. Nous sommes heureux d’essayer de prendre notre part au développement et à la défense de l’information.